De diffuseur élu au Temple de la renommée à recrue de l’année chez les retraités
Je crois que nous nous arrêtons tout, à un moment ou à un autre, pour songer à la retraite et à ce que serait la vie si on brisait la routine du travail et à la façon de passer le temps. Cependant, il arrive rarement qu’on ait l’occasion d’avoir un avant-goût de la retraite.
Mais moi, je l’ai eu cette chance.
Je diffusais un match de la LNH à Edmonton le 11 mars 2020 et je prévoyais me rendre à Boston le lendemain pour une autre affectation. Peu importe où on était, les médias n’avaient de mots que pour une fermeture imminente en raison du coronavirus. J’utiliserais un euphémisme de premier ordre si je disais que l’équipe avait peine à se concentrer. Nous étions tous collés à notre téléphone pour connaître les plus récents développements. Au cours de la première pause télé de la deuxième période, la NBA annonçait qu’elle suspendait ses activités pour le reste de la saison. Je me suis rendu au service des voyages pour annuler mon voyage à Boston et j’ai demandé qu’on me réserve une place sur le premier vol pour rentrer à la maison.
Comme plusieurs de mes compatriotes, la maison, c’est l’endroit où j’habite. Ma vie professionnelle était mise sur pause. Après 40 années de déplacements en avion et en train et de matchs de hockey, on n’avait plus besoin de moi nulle part. Je n’avais officiellement plus rien à faire.
Je n’ai pas réalisé ce qui se passait, mais cette pandémie qui me retenait coincé à la maison était sur le point de modifier ma façon de vivre et de voir le travail.
La LNH sans les partisans de hockey, c’était plate.
Je suis retourné décrire des matchs en août et en septembre 2020 à Toronto et Edmonton, que j’appelle « mes bulles », mais cela ne ressemblait en rien à cet emploi que j’occupais depuis si longtemps. C’était une sentence, et non une affectation, parce qu’il n’y avait pas de partisans, pas de voyages et pas le moindre plaisir.
Lorsque la LNH annonça pour 2021 un calendrier limité sans partisans, j’ai décidé de ne pas travailler cette saison. Les voyages en avion, les séjours à l’hôtel, les protocoles et les restrictions en temps de pandémie me rendaient mal à l’aise. J’avais la chance de ne pas y être forcé. On ne peut pas tous s’offrir le luxe de rester à la maison. Je suis reconnaissant envers les travailleurs aux premières lignes. Tout le monde, depuis les travailleurs de la santé jusqu’aux employés d’épicerie, devait travailler dans des conditions qu’on n’avait jamais vécues auparavant. C’était vraiment du jamais vu.
Ma « pratique » de la retraite
Ayant un mode de vie ancré dans mes habitudes et croyant dur comme fer dans le pouvoir de la routine, je n’ai rien arrêté. J’ai simplement modifié mon approche alors que les jours et les mois passaient. Le temps était venu d’adopter une nouvelle routine dont l’entraînement, le bien-être mental et la stimulation faisaient toujours partie.
Je savais comment procéder pour préserver ma routine santé tout en étant sur la route, puisque je le faisais depuis un tout jeune âge. Mais apprendre à le faire à partir de chez moi venait complètement chambouler mon monde.
Cela équivalait à « pratiquer » ma retraite :
- Trois marches par jour avec notre golden retriever. Beau temps, mauvais temps, qu’il le veuille ou non.
- Je faisais du vélo stationnaire. Les gymnases étaient fermés, de sorte que nous avons dû transformer nos maisons pour les aménager en vue de notre entraînement. Je suis personnellement fier d’avoir trouvé un vélo stationnaire, puisqu’il était devenu aussi difficile de trouver n’importe quoi pour faire de l’exercice que de dénicher une chambre d’hôtel à Daytona pendant la semaine de relâche.
- J’ai téléchargé une application et trouvé des cours pour le vélo stationnaire. Lorsqu’il pleuvait et que je n’avais pas envie d’aller courir, j’écoutais, en baissant le volume, des émissions de cardio où l’on semble toujours crier et j’allais courir pendant 45 minutes sur les chemins de campagne sinueux de Normandy.
- J’ai vécu le printemps en Colombie-Britannique. Il s’agit là d’une saison formidable que j’ai ratée pendant un quart de siècle. J’ai également eu l’occasion de jouer au golf en mars pour la première fois de ma VIE.
- J’ai essayé nos nouvelles recettes. Je suis gourmand en matière de lecture et je ne refuse jamais un bon livre. Pendant la pandémie, j’ai découvert les livres de recettes. Je plongeais tous les matins dans Yum and Yummer, ainsi que dans les livres de recettes inspirant et élégants de Vij. J’allais chercher les ingrédients, déambulant dans les marchés, pour ensuite me terrer dans ma cuisine tout l’après-midi afin d’y préparer un régal culinaire différent et (surtout) délicieux.
Comment tirer le meilleur de la vie
Ma pratique en vue de la retraite m’a aidé à réaliser que ce que je faisais déjà depuis 30 ans m’était favorable. Puisque je voyageais toujours seul et fréquentais les restaurants, je devais prendre des décisions saines quant à ma santé physique, mon alimentation et mon style de vie. J’aurais été incapable de maintenir ce rythme si je ne m’étais pas bien senti.
Je ne vous dirai jamais quoi faire de votre vie, parce que je crois que nous devrions tous faire ce qui nous convient le mieux. Il existe cependant certaines choses qui m’ont aidé à bien me sentir face à la vie, à mon travail et à moi-même.
Recherchez des intérêts en dehors de votre travail
Je suis étonné de constater l’attention que suscitent chez moi des choses qui m’ont déjà semblé ennuyantes et banales avant la retraite.
Trouvez une activité physique qui vous convient.
La course n’est pas faite pour tout le monde, mais elle est importante à mes yeux. J’avais un itinéraire de course dans toutes les villes de la ligue. Que ce soit sur le Mont Royal à Montréal ou sur la rivière Guadaloupe à San Jose, je me sens bien dans mon corps lorsque je cours et cela m’aide à éliminer les toiles d’araignée mentales, ce qui est essentiel à mon bien-être. Je vois la course comme une expérience personnelle, mais il n’y a pas que la course. Vous devez simplement trouver une activité qui vous convient. Au fur et à mesure que j’avance en âge, j’apprends qu’une longue marche fait également beaucoup de bien. Peu importe ce qui vous aide à bien vous sentir, bougez.
Rencontrez vos voisins.
Pendant longtemps, ma vie et mes amis se résumaient aux gens que je rencontrais lorsque j’étais sur la route. Je connais des gens dans toutes les villes en Amérique du Nord, mais je ne savais rien des gens qui habitent en face de chez moi. Maintenant, lorsque je prends une marche en compagnie de mon chien, cela me prend parfois deux fois plus de temps, parce que je m’arrête pour bavarder avec les gens qui habitent près de chez moi. Je me suis surpris en train de fredonner la chanson de Sesame Street « qui sont les gens dans votre quartier ». J’en suis venu à réaliser que les gens que vous rencontrez en marchant dans votre quartier peuvent être inspirants et produire un effet thérapeutique. Il n’est pas nécessaire de toujours voyager pour vivre pleinement notre vie.
Allez marcher sur la plage
Je ne voyais pas ma vie filer lorsque je travaillais et je voyageais. Mais peu importe à quel point j’étais occupé, j’ai toujours pris le temps se réserver un moment malgré tout ce brouhaha pour profiter d’une marche sur la plage. Profitez au maximum des moments qui s’offrent à vous. Ce genre de choses m’a permis de mieux me sentir lorsque de devais aller travailler et alors que je menais une vie effrénée.
Préparez-vous pour les vraies choses
Tout au long de notre mariage qui a duré plus de 30 ans, mon épouse, Denise, a toujours été une femme au foyer alors que je parcourais l’Amérique du Nord pour regarder des matchs de hockey. Elle avait également assisté à toutes les rencontres entre parents et enseignants en plus de conduire le taxi familial pour amener les enfants aux cours de danse, aux matchs de hockey et aux jeux alors que j’étais sur la route.
Comprenez-moi bien. Je suis reconnaissant de tout ce qui m’est arrivé pendant ma carrière. J’ai eu la chance d’occuper un emploi incroyable qui m’a permis de vivre des aventures formidables. J’ai également réalisé qu’il est aussi relativement agréable d’être à la maison.
Ainsi, lorsqu’est arrivé l’été 2021 et que la saison de hockey approchait, je n’étais pas prêt à recommencer. Après avoir diffusé des matchs de hockey au cours de 5 décennies différentes, je n’avais pas envie de faire ma valise pour me rendre dans un autre aéroport. La pandémie n’était pas encore terminée et je pratiquais mon rôle de retraité depuis un an, que je crois avoir passablement bien réussi.
J’avais énormément de chance d’occuper un emploi que j’ai vraiment adoré et que j’apprécie énormément. J’ai eu la chance de côtoyer des gens fantastiques lors de certaines situations passablement excitantes.
Ce fut le meilleur emploi de ma vie
C’est tôt pour moi. Je me sens comme si je terminais la saison d’exhibition pour la retraite et j’entreprends maintenant la première saison régulière de ma vie après le travail. J’ambitionne de devenir la recrue de l’année chez les retraités.
Je voyage moins et je gagne moins, mais les repas sont délicieux et je me suis habitué. Je ne peux imaginer ma retraite « à ne rien faire ». En fait, je crois que le mot « retraite » ne correspond pas à ce que nous faisons lorsque nous quittons un métier que nous avons occupé si longtemps. On parle plutôt de réinventer, de recalibrer, de se réorienter et de se revitaliser.
Un jour, lorsque vous serez prêt mentalement et physiquement pour affronter ce que nous qualifions de « retraite », vous trouverez les portes grandes ouvertes pour ce que vous n’avez pas encore eu le temps de faire dans votre vie.
Je n’arrive pas à croire à quel point je suis occupé même si aucun vol ni aucun match ne sont inscrits à mon horaire.
Un vieil ami m’a dit que la retraite était le meilleur emploi qu’il ait occupé. Jusqu’ici, il a raison.