Comment rester forts en période de turbulences

Au début du mois, le Canada et le monde entier ont souligné un anniversaire étrange : cinq ans se sont écoulés depuis le début de la pandémie mondiale de COVID-19 qui a changé des vies du jour au lendemain.

Aujourd’hui, cinq ans plus tard, nous sommes confrontés à un autre type de défi : une guerre commerciale sans précédent entre les États-Unis et le Canada qui pourrait entraîner la perte d’un million d’emplois au Canada.

Politique et stress chronique

La nature fluctuante des droits de douane américains, ainsi que les propos de Donald Trump selon lesquels il ferait du Canada « un 51^e État », a accru le niveau d’anxiété des Canadiens à un moment où beaucoup s’inquiètent déjà du coût de la vie.

Des études récentes montrent que l’exposition au stress politique est liée à une moins bonne santé physique et émotionnelle et la plupart des thérapeutes déclarent que leurs patients discutent de politique au cours de leurs séances.

« En général, nous savons que le stress chronique nuit au bien-être psychologique et physique. Il a des conséquences néfastes sur notre corps », explique Brett Ford, professeur agrégé de psychologie à l’Université de Toronto, qui étudie le lien entre les émotions et l’engagement politique.

« Il y a de bonnes raisons de penser que pour beaucoup de gens, la politique est une forme de stress chronique. »

Les hommes n’ont pas à « endurer »

Alors que les effets de la guerre commerciale se font largement sentir chez tous les Canadiens, les secteurs les plus touchés, soit ceux de l’automobile, de l’acier, de l’aluminium et de la fabrication de machines, sont principalement composés d’hommes.

En partie à cause des normes sociales voulant qu’ils soient « stoïques » et cachent leurs émotions, les hommes sont moins susceptibles de demander de l’aide dans les moments difficiles. Au Canada, seulement 30 % des personnes qui ont recours à des services de santé mentale sont des hommes.

Alors que les femmes sont trois fois plus susceptibles de tenter de se suicider, 75 % des décès par suicide au Canada concernent des hommes.

Le D^r David Kuhl est professeur à la faculté de médecine de l’Université de Colombie-Britannique et directeur général de Blueprint un organisme à but non lucratif axé sur la santé et le bien-être des hommes.

Au cours de leur vie, les hommes doivent faire preuve de résilience, et la conscience émotionnelle est essentielle pour y parvenir, explique le D^r Kuhl, qui est titulaire d’un doctorat en médecine. Il souligne que les hommes et les garçons ont souvent du mal à exprimer des émotions qui ne sont pas empreintes de colère.

« La résilience exige des hommes qu’ils comprennent ce qui se passe en eux. Elle les oblige à réfléchir à leurs valeurs, à leurs croyances et à leur identité », explique le Dr Kuhl.

Ses recherches actuelles portent sur l’élaboration de stratégies visant à renforcer la résilience des premiers intervenants, tels que les pompiers et les policiers.

« La résilience est un ensemble de compétences : c’est quelque chose que l’on peut apprendre tout au long de la vie », explique le D^r Kuhl. « En grandissant, les hommes et les garçons commencent à réaliser que l’adversité n’est pas toujours mauvaise, qu’elle peut être canalisée vers des résultats plus positifs dans leur vie. »

Le D^r Kuhl s’appuie sur l’analogie de l’arbre qui devient plus fort après avoir résisté à des vents violents. Selon lui, un arbre qui n’est pas capable de résister à des vents violents n’est pas résilient et risque donc de s’effondrer en cas de tempête.

Trois conseils pour rester fort dans les moments difficiles

Si les hommes veulent être en bonne forme physique, ils savent ce qu’il faut faire. Les outils sont évidents : les salles de sport, les entraîneurs personnels et les clubs de course à pied, par exemple.

Mais comment les hommes peuvent-ils se remettre en forme émotionnellement? Voici trois conseils que les hommes peuvent utiliser pour mieux gérer leurs émotions et renforcer leur résilience :

1. Écrivez-les : Sortez un bon vieux stylo et du papier et écrivez régulièrement ce que vous ressentez. Ce n’est pas nécessaire que ce soit long ou compliqué.
   
2. Parlez-en : Créez des espaces sécuritaires où vous pouvez discuter ouvertement de vos émotions avec des personnes proches de vous.
   
3. Créez une « salle de sport émotionnelle » :  Joignez-vous à un groupe d’hommes dans votre communauté. Des groupes comme Men’s Shed offrent un espace pour entrer en contact avec d’autres hommes, nouer des amitiés et avoir accès à des ressources pour renforcer votre résilience.

En conclusion : les liens sociaux font les hommes forts

« Le simple fait de savoir que quelqu’un vous soutient vous rend plus résilient que si vous n’aviez pas cette personne à vos côtés », explique le D^r Kuhl.

« Il s’agit d’un aspect vraiment important de la résilience, notamment le fait d’avoir une communauté de soutien où les hommes peuvent être honnêtes les uns avec les autres au sujet de leurs angoisses et de ce à quoi ils sont confrontés dans la vie. »

Le D^r Kuhl affirme que l’isolement social et la honte qui l’accompagne peuvent être préjudiciables à la santé émotionnelle et physique des hommes. « Dès qu’il y a de la honte, c’est comme si on tournait la clé d’une serrure qui maintient les hommes isolés », explique-t-il.

« Si les liens sociaux et la réduction de l’isolement social peuvent amener les hommes à s’intégrer dans une communauté où ils peuvent être honnêtes à propos de leurs sentiments, l’anxiété, la dépression et les idées suicidaires des hommes diminueront. »

La résilience collective de notre pays s’est manifestée le mois dernier à Boston, lorsque l’équipe canadienne a remporté la Confrontation des 4 nations en prolongation, en battant l’équipe des États-Unis.

Le tournoi de hockey a soudainement pris un sens plus profond pour les Canadiens en raison des menaces persistantes que l’administration Trump fait peser sur notre économie et notre souveraineté. 

Et pour beaucoup d’hommes, la victoire 3-2 du Canada en prolongation face à notre voisin du sud ne se résumait pas à une simple victoire au hockey, c’était bien plus que cela. Elle symbolisait le fait que même lorsque nous sommes au pied du mur dans une bataille apparemment perdue d’avance, nous sommes toujours capables de nous unir, de nous battre avec acharnement et de finir par gagner.

Le D^r Kuhl affirme que le récent match d’Équipe Canada a permis aux hommes de comprendre l’importance de se rassembler dans un moment d’anxiété collective. « Nous traversons une période sans précédent », déclare le D^r Kuhl. « Un match de hockey ne changera pas cette réalité pour les hommes, mais il renforce l’importance des liens sociaux lorsque les temps sont durs. »

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