En tant que gastro-entérologue, je trouve que les progrès réalisés par le Canada en matière de dépistage et de traitement du cancer colorectal sont encourageants. À l’heure actuelle, 90 % des cas sont traitables lorsqu’ils sont détectés à un stade précoce. Cela dit, le cancer colorectal reste la deuxième cause de décès par cancer chez les hommes au Canada. Cela s’explique en partie par le fait que de nombreux hommes hésitent encore à parler de l’évacuation de leurs selles avec leur médecin de famille.
L’un des obstacles que je constate dans mon cabinet est la gêne. Les gens ne veulent pas parler de leurs selles ou évoquer des symptômes tels que les saignements rectaux. Je comprends que ce ne sont pas vraiment des sujets de conversations à table. Mais en vérité, nous devons normaliser le fait de parler de notre santé digestive. Il ne faut pas en avoir honte; il s’agit de votre santé et une prise en charge précoce peut vous sauver la vie.
Le dépistage est essentiel
S’il est une chose sur laquelle je n’insisterai jamais assez, c’est sur l’importance d’un dépistage régulier du cancer colorectal. Cela ne concerne pas uniquement les personnes présentant des symptômes évidents ou des antécédents familiaux : tout le monde devrait être proactif pour réduire le risque de maladie. Après tout, le dépistage est le seul moyen avéré de diminuer votre risque, simplement parce qu’il permet de détecter le cancer avant que ce dernier ne devienne mortel.
En quoi consiste le dépistage?
Parlez-en à votre médecin ou à votre infirmière praticienne pour déterminer quelle forme de dépistage du cancer colorectal vous convient. Voici les trois tests et procédures de dépistage principaux :
Test immunochimique fécal (TIF) : Il s’agit d’un moyen simple, sûr et non invasif de dépister le cancer colorectal à domicile. Le TIF détecte de petites quantités de sang dans les selles, ce qui pourrait indiquer un cancer colorectal ou des polypes précancéreux, c’est-à-dire des excroissances anormales dans le côlon ou le rectum.
Un seul échantillon de selles est nécessaire pour effectuer le test, et vous n’êtes pas obligé de changer de régime alimentaire ou de médicaments. Une fois l’échantillon prélevé, vous l’envoyez à une clinique ou vous le déposez dans les deux jours. Vous recevrez vos résultats par courrier et votre médecin en recevra également une copie.
Si vos résultats sont anormaux, d’autres examens, comme une coloscopie (voir ci-dessous), seront requis. Si vos résultats sont normaux, répétez le test tous les deux ans jusqu’à l’âge de 74 ans pour assurer un contrôle régulier.
Coloscopie : Pour les personnes courant un risque élevé de cancer colorectal, la coloscopie est la méthode de dépistage la plus complète dans la mesure où elle permet d’examiner l’ensemble du côlon. Au cours de cet examen, les médecins ont la possibilité de faire des biopsies et d’enlever les polypes qui pourraient devenir cancéreux.
Bien que la coloscopie ne soit pas recommandée pour les personnes présentant un risque moyen, cet examen est crucial pour les personnes avec des antécédents familiaux, ayant déjà eu des polypes ou manifestant des symptômes tels que des saignements rectaux. Après un résultat anormal au test TIF, il convient de procéder à une coloscopie dans les huit semaines qui suivent afin de garantir une détection précoce.
Qui doit faire l’objet d’un dépistage et quand?
La plupart des cas de cancer colorectal sont encore diagnostiqués chez des personnes de plus de 50 ans. C’est la raison pour laquelle les directives en matière de dépistage recommandent généralement de commencer les tests à cet âge. Si vous avez des antécédents familiaux de cancer colorectal, notamment si un parent au premier degré a été diagnostiqué avant l’âge de 60 ans, vous devrez peut-être commencer à vous soumettre à un dépistage plus tôt. En fonction des facteurs de risque, certaines personnes commencent à effectuer des tests de dépistage dès l’adolescence.
Pour mieux comprendre votre risque de contracter un cancer colorectal ainsi que d’autres maladies courantes chez l’homme, ayez recours au Bilan de santé pour les hommes.
Pour les personnes atteintes de maladies inflammatoires de l’intestin (MICI) telles que la maladie de Crohn ou la colite ulcéreuse, la procédure change un peu. L’inflammation chronique de l’intestin est associée à un risque accru de cancer colorectal. La bonne nouvelle? En contrôlant de manière optimale l’inflammation par des médicaments, un régime alimentaire ou d’autres traitements, vous pouvez réduire considérablement votre risque.
Quels sont les symptômes à surveiller?
L’un des aspects délicats du cancer colorectal est qu’il ne présente pas toujours de symptômes évidents, en particulier à ses premiers stades. Encore une fois, c’est la raison pour laquelle le dépistage est si crucial. Cependant, certains avertissements ne sont jamais à ignorer :
- Présence de sang dans les selles : Ce symptôme est l’un des plus importants. Ce n’est pas normal et cela justifie systématiquement un examen plus approfondi.
- Un changement dans vos habitudes intestinales : On me demande souvent : « Combien de fois par jour dois-je aller à la selle? » En réalité, il n’y a pas de réponse exacte. Ce qui compte, c’est ce qui est normal pour vous. Si votre routine habituelle change soudainement – qu’il s’agisse de la fréquence, de la consistance ou de l’urgence – c’est le signe qu’il faut en parler à votre médecin.
- Une gêne abdominale : Il est facile d’ignorer ce symptôme. Parfois, il est bénin, mais il peut aussi être le signe précurseur d’un problème.
- La numération globulaire : Une carence en fer, par exemple, peut dans certains cas être le premier signe d’un problème au niveau du côlon, même si vous ne présentez aucun symptôme lié à l’intestin.
Quel est l’impact des facteurs liés au mode de vie sur le risque de contracter un cancer colorectal?
Plusieurs facteurs liés au mode de vie peuvent contribuer à augmenter le risque de cancer colorectal. L’obésité, la consommation accrue de viande rouge et une forte consommation d’alcool ont été associées à un risque plus élevé.
Cependant, il est essentiel de se rappeler qu’une association est différente d’une cause. En d’autres termes, ce n’est pas parce qu’une personne mange plus de viande rouge ou boit à l’occasion un verre de vin qu’elle développera nécessairement un cancer colorectal. Ces éléments sont toutefois à garder à l’esprit lorsque vous vous penchez sur votre santé globale.
L’augmentation du nombre de cancers colorectaux chez les jeunes adultes
Nous constatons une augmentation récente des cas de cancer colorectal chez les jeunes adultes. Nous ne pouvons ignorer cette tendance, même si nous n’en comprenons pas encore toutes les raisons.
Des hypothèses sont avancées : Peut-être est-ce lié au mode de vie de plus en plus sédentaire que mènent de nombreuses personnes aujourd’hui, combiné à de mauvaises habitudes alimentaires et à l’obésité. Mais là encore, nous nous gardons bien de tirer des conclusions hâtives. Ce que nous savons, c’est que des adultes plus jeunes sont susceptibles de développer et développent un cancer colorectal. Il est donc essentiel de prendre tous symptômes au sérieux, quel que soit votre âge.
Améliorer le dépistage et la sensibilisation
Bien que le dépistage ait amélioré notre capacité à détecter la maladie à un stade précoce, du travail reste encore à accomplir. Au Canada, nous misons sur les analyses des selles comme outil de dépistage primaire. Bien que ces analyses soient utiles, j’espère que la science nous fournira un jour une méthode de dépistage plus facile et plus accessible afin d’encourager un plus grand nombre de personnes à se soumettre à un test de dépistage.
En attendant, nous diagnostiquons davantage de cancers à des stades plus précoces, ce qui est une grande victoire. Plus tôt nous les dépistons, meilleurs sont les résultats. Cependant, le fait que des patients plus jeunes soient diagnostiqués est une tendance qui nous rend humbles, et il reste encore beaucoup à comprendre sur les raisons de ce phénomène.
Mais le message est clair : soyez à l’écoute de votre corps, faites-vous dépister le cas échéant et n’ayez pas peur de parler de votre santé intestinale. Cette conversation pourrait vous sauver la vie.
Avez-vous une expérience du cancer colorectal et aimeriez-vous raconter votre histoire? Veuillez nous envoyer un courriel à l’adresse suivante : [email protected].
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